« …Les profits à court terme n’étant pas au rendez-vous, la Sapmer abandonne une stratégie qui visait à miser sur la valeur ajoutée, pour s’orienter vers une course frénétique aux volumes…
L’ambition était sans limites : construire en à peine une quinzaine d’années plus de vingt thoniers senneurs dernier cri, construire des usines de transformation à Maurice puis en Papouasie-Nouvelle-Guinée, devenir un acteur clef du sashimi, le thon haut de gamme, s’imposer sur le marché très fermé du Japon, avec comme objectif de dépasser les 100 millions d’euros de chiffre d’affaires en doublant les captures totales de thon tropical des armateurs français.
Pour cela, l’entreprise s’est implantée dans des paradis fiscaux, à Singapour et au Luxembourg. Elle a bénéficié de subventions, levé des centaines de millions d’argent frais et développé une stratégie de marketing et de communication basée sur la valorisation de produits haut de gamme plutôt que sur la course aux volumes…
Mais il a suffi que les profits ne soient pas à la hauteur pour que la maison-mère, le groupe financier Jaccar, reprennent en main les choses, au détriment, bien sûr, de l’environnement marin et des conditions sociales de l’entreprise.
Le virage est radical : baisse des salaires des officiers bretons (jusqu’à -48% !), réduction des effectifs des marins africains, notamment malgaches, mais surtout pression accrue sur la ressource (les patrons des thoniers doivent maintenant capturer 8000 t par an, alors qu’ils plafonnaient a 5000 t)…
Quand tout le monde parle de limiter le nombre de DCP, la Sapmer s’engage dans une fuite en avant, en annonçant l’utilisation de navires de soutien destinés à déployer encore plus de DCP [dispositifs de concentration de poissons]… »
Photo : site EuropeAid