« Lors de la session plénière du 11 décembre 2013, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème :
« Combattre le travail forcé en Europe et dans le monde: quel rôle pour l’UE – Contribution du CESE à la conférence 2014 de l’OIT ».
La section spécialisée « Relations extérieures », chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 avril 2014.
Lors de sa 498e session plénière des 29 et 30 avril 2014 (séance du 30 avril 2014), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour, aucune voix contre et 1 abstention.
1. Conclusions et recommandations
La traite des êtres humains n’a pas sa place dans une société civilisée. Pourtant, elle est en augmentation et le travail forcé est devenu une composante permanente de certains domaines du marché du travail et un gros marché pour le crime organisé. La 103e session de la Conférence internationale du travail, qui se déroulera en juin 2014, a mis à son ordre du jour un débat pour renforcer la lutte contre le travail forcé. En effet, depuis les premières conventions de l’Organisation internationale du travail sur ce thème, en 1929 (n° 29) et en 1957 (n° 105), la nature du travail forcé a évolué. Autrefois surtout le fait des États, il est aujourd’hui concentré dans l’économie privée et s’accroît du fait de la mondialisation, des migrations, de l’économie informelle et des réseaux mondialisés de la criminalité. L’Union européenne a adopté une directive contre la traite des êtres humains, qui prend en compte le travail forcé . Un nouvel instrument international devrait être adopté en juin prochain, par les États et les partenaires sociaux de l’OIT. Le Comité économique et social européen a, dans ce cadre, des propositions à formuler du fait de l’expérience de l’Europe, sur son territoire et à l’extérieur de ses frontières, en mettant en particulier l’accent sur le rôle que joue et pourrait jouer davantage encore la société civile pour une réelle application des droits fondamentaux. L’Observatoire du marché du travail sera chargé de suivre l’évolution de l’application tant de la directive sur la traite des êtres humains que des textes adoptés à l’OIT pour combattre le travail forcé.
1.1 Recommandations
1.2 À l’Union européenne:
Adopter une position commune à l’OIT, pour que les objectifs de la directive européenne pour prévenir et combattre la traite des êtres humains et protéger les victimes et la stratégie pour l’éradication la traite des êtres humains (2012) soient intégrés dans le droit international du travail
1.3 Aux États:
• lors de la prochaine Conférence internationale du travail, adopter un protocole additionnel à la convention 29, complété par une recommandation, intégrant la traite des êtres humains pour exploitation par le travail et comblant ses lacunes dans les domaines de la prévention, de la protection des victimes, de leur indemnisation et de la sanction des trafiquants reprenant dans le droit international ce qui existe déjà dans le droit européen.
• ratifier la convention 189 sur le travail domestique,
• renforcer les moyens des inspections du travail et la coopération européenne entre elles.
• mettre en cohérence les politiques sur la traite des êtres humains et l’immigration et s’assurer de la mise en œuvre effective de la Directive 2011/36 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes .
• s’attaquer aux causes en réduisant la pauvreté, la vulnérabilité des victimes et sensibiliser l’opinion publique
1.4 Aux entreprises-employeurs et aux investisseurs:
• s’assurer que la chaîne d’approvisionnement est exempte de travail forcé et respecte les droits humains, tant en Europe que dans les pays tiers, en application des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales et de la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale de l’OIT.
• suivre les travaux et participer à la coalition des entreprises contre la traite des êtres humains qui sera bientôt lancée par la Commission européenne
1.5 Aux organisations syndicales:
former les affiliés pour qu’ils sachent s’adresser aux victimes et les accompagner dans leurs démarches, en priorité dans les secteurs sensibles tels que l’agriculture, les chantiers de construction, les restaurants et hôtels ou le travail domestique; travailler avec les ONG spécialisées dans l’accompagnement des migrants sans papiers, qui doivent être considérés comme des victimes et non des délinquants.
1.6 Aux associations:
les associations de consommateurs doivent s’inquiéter de l’origine des produits, et exiger la transparence de toute la chaîne de fabrication.
Les associations qui aident les migrants clandestins, organisent les travailleurs domestiques ou luttent pour l’abolition de la prostitution devraient être des partenaires reconnus et écoutés de la lutte contre le travail forcé… »
Photo : RSE et PED