Evasion fiscale dans les pays en développement – Pétition pour le vote du projet de loi français sur la lutte contre la corruption et la transparence de la vie économique

11 mars 2016 - Peuples Solidaires

« Dans le monde, 663 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable, et 57 millions d’enfants ne vont pas à l’école. Or, si les pays dits pauvres – mais parfois riches en ressources – n’ont pas les moyens de financer les services publics les plus essentiels, c’est notamment parce qu’ils perdent chaque année plus de 180 milliards d’euros en raison de l’évasion fiscale des multinationales.

Dans les prochaines semaines, le projet de loi Sapin « relatif à la lutte contre la corruption et la transparence de la vie économique » va être étudié au Parlement français. Dans le même temps, des négociations sont prévues au niveau européen sur l’application de mesures de transparence sur les activités des multinationales…

Nos enquêtes montrent comment des multinationales réussissent à échapper à l’impôt en utilisant les failles du système fiscal international, privant les populations des pays parmi les plus pauvres du monde de revenus cruellement nécessaires. Mais faute de transparence, chaque enquête nécessite des moyens d’investigation importants et ne peut révéler que des cas spécifiques, alors que le problème est généralisé…

Au Malawi, pays le plus pauvre du monde, l’espérance de vie est de 55 ans seulement. Environ 10% des Malawites sont atteint-e-s du SIDA, et le pays a le plus haut taux de mortalité maternelle du monde, en partie parce que les soins de santé sont insuffisamment financés : il y a seulement 300 médecins dans un pays qui compte 16 millions d’habitant-e-s. Or, dans une enquête récente (2015), nous avons montré comment l’évasion fiscale d’une seule multinationale minière [Paladin Energy] a privé le Malawi de 43 millions de dollars US au cours des six années : de l’argent qui aurait pu financer 431 000 traitements annuels contre le VIH; ou 17 000 salaires annuels d’infirmier-e-s ; ou encore 39 000 salaires annuels d’enseignant-e-s.

En 2012, nous avons découvert comment Zambia Sugar, une filiale de la multinationale Associated British Foods, avait structuré son activité pour ne payer aucun impôt sur le revenu alors qu’elle avait réalisé 92 millions d’euros de bénéfices avant impôts en Zambie entre 2007 et 2010…

Au Ghana, une filiale de l’entreprise SabMiller n’avait payé en 2010 aucun impôt sur ses revenus depuis 2 ans en ne déclarant pas de profit sur le territoire, en structurant notamment son activité pour transférer des profits dans les paradis fiscaux, alors qu’avec 32 millions d’euros de bières vendues, elle occupait la 2e place de ce marché…

…pour lutter contre l’évasion fiscale, certains Etats vont procéder à des échanges d’informations entre leurs administrations, notamment avec certains paradis fiscaux devenus sous la pression un peu plus coopératifs. Mais les citoyen-ne-s, les journalistes, les ONGs n’y auront pas accès, et les gouvernements des pays en développement risquent d’être exclus de ces échanges qui restent confidentiels. Sans avoir accès à toutes les informations relatives à une réelle transparence fiscale des multinationales, il sera toujours très difficile pour les pays en développement de déceler les pratiques d’évasion fiscale…

Le gouvernement français doit prendre une position claire en faveur de la transparence et agir pour la mettre en œuvre… »

Photo : Mostra SA, Site EuropeAid – Dispensaire, Dar Es Salaam, Tanzanie

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