« Au lendemain de la crise financière, les adversaires désignés dans la guerre internationale contre les paradis fiscaux étaient principalement des îles exotiques et les riches particuliers ayant caché leurs avoirs à l’ombre des palmiers. De l’industrie de l’évasion fiscale et des acrobaties des grandes entreprises pour éviter l’impôt, il n’était jamais question ou presque. Les quelques voix qui osaient pointer la responsabilité des multinationales dans le pillage des recettes publiques, en particulier dans les pays en développement, rencontraient peu d’attention ou des fins de non recevoir. L’incapacité des pays pauvres à venir à bout du fléau des flux financiers illicites était mise sur le compte de leurs administrations fiscales trop faibles ou corrompues.
[…]
Un problème enfin reconnu par les pays riches
Devant l’aggravation de la crise économique et l’asphyxie des budgets publics, cette indulgence à l’égard des pratiques abusives des multinationales est devenue difficile à justifier. D’autant que des organisations de la société civile et des journalistes s’entêtaient à raconter, preuves à l’appui, les recettes utilisées par les grands groupes pour délocaliser leurs profits, à la barbe des États. La multiplication des enquêtes et études, longtemps rares, a permis d’affiner notre compréhension du phénomène et sa mesure. Grâce à cette action opiniâtre, à la mobilisation citoyenne et aussi – reconnaissons-le – grâce aux excès caricaturaux auxquels se livrent quelques géants du web, les pratiques des entreprises multinationales font l’objet maintenant de toutes les attentions. »