Rapport d’observation sur le respect des droits de l’homme sur les sites des grands projets au Cameroun : le cas de Lom Pangar, Mballam, Nkamuna et Mobilong

21 février 2014 - RECODH [Cameroun]

« Conformément à son objectif N° 5 qui est de rédiger des rapports sur la situation des droits de l’homme, le RECODH a opté cette fois-ci pour un rapport thématique. Le choix a porté pour des questions d’actualités et de pertinence sur le respect des droits de l’homme sur les sites des grands projets. Pour des raisons stratégiques et d’efficacité, l’étude s’est focalisée sur les grands projets réalisés dans la région de l’Est.

La méthodologie utilisée pour la rédaction de ce rapport s’est articulée autour de trois points : la collecte des données sur le terrain, la recherche documentaire et l’analyse et le traitement des données collectées.

Les activités étant au ralenti à Nkamuna (extraction de Cobalt par Geovic) et à Mballam (exploitation de fer par Camiron), à Mobilong (exploitation du diamant par C&K Mining) où le projet est encore dans la phase d’exploration, nos enquêteurs qui ont séjourné sur ces sites, ont porté un focus sur le Projet Hydroélectrique de Lom Pangar (PHLP).

Le PHLP visait deux objectifs: compléter la régularisation de la Sanaga pour la l’optimisation de la production des centrales existantes et créer des conditions favorisant l’aménagement de nouveaux sites à l’aval. Ce projet aura des impacts directs, indirects et induits sur Ies populations et les habitats naturels tant pendant la phase de construction que d’exploitation

Le Maître d’ouvrage du PHLP est EDC, une entreprise de droit camerounais placée sous la tutelle du MINEE. De nombreux départements ministériels sont également impliqués dans le projet dont le Ministère de la Défense, le Ministère de la Santé, le Ministère de l’Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement Durable, le Ministère de la Culture, le Ministère de l’Energie et de l’Eau, Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, Ministère de la Forêt et de la Faune, le Ministère des travaux publics, etc.

Le mécanisme de coordination du PHLP comprend entre autres un Comité de pilotage, un Comité de suivi, facilitation et accompagnement, un Commission de Constat et d’Evaluation, etc.
Le Comité de pilotage regroupe tous les ministères impliqués dans la mise en œuvre du Plan de Gestion Environnemental et Social (PGES). Ce Comité devait se Réunir une fois par trimestre et dispose d’un Secrétariat Technique qui lui doit se réunir une fois par mois.

PROJET DE RENFORCEMENT DE LA CONTRIBUTION DE LA SOCIETE CIVILE A LA CONSOLIDATION DE L’ETAT DE DROIT AU CAMEROUN

Le Comité de Suivi, de Facilitation et d’Accompagnement (CSFA) a été opérationnalisé par la décision du Gouverneur de la région de l’Est du 18 avril 2009 l’instituant. Le Comité était présidé par le Gouverneur et avait pour Vice-président le Directeur d’EDC. Les administrations concernées ont la charge d’intégrer leurs engagements au niveau du PGES dans leur plan de travail régional ou local.

La Commission de Constat et d’Evaluation (CCE) est présidée par le préfet ou le Gouverneur selon que l’aire géographique couvre un département ou plusieurs départements. Elle est composée des ministères compétents et des chefs traditionnels. Elle est chargée entre autres de choisir et faire borner les terrains, constater les droits et évaluer les biens mis en cause, identifier leurs titulaires et propriétaires.

Etant entendu que la mise en œuvre du Plan d’Indemnisation et de Réinstallation pouvait engendrer des désaccords (erreur dans l’identification et l’évaluation des biens, désaccord sur les limites des parcelles, conflit sur la propriété d’un bien, successions, divorces et autres problèmes familiaux pouvant engendrer des conflits entre les héritiers ou les membres d’une famille, désaccord sur les mesures de réinstallation, conflit entre les entreprises et les populations, etc.), un dispositif pour accueillir et traiter les plaintes a été prévu. Environ 1262 plaintes ont été enregistrées au niveau des centres de communication entre janvier et juin 2013. Ces plaintes portaient essentiellement sur: l’omission (personnes non prises en compte par le décret d’indemnisation) et la sous-évaluation des dommages. D’après EDC, à la fin du mois de juin 2013, 80% des plaintes avaient été traitées. Selon les populations, ce traitement consistait en des rejets et promesses non tenues.

De nombreuses victimes n’ont pas déposé de plaintes pour plusieurs raisons dont l’insuffisante connaissance du mécanisme et des procédures et l’attitude menaçante et méprisante de certains agents de la CCE. Certaines plaintes déposées ont été qualifiées de fictives, non fondées et sans intérêts. Par ailleurs des agents de la CCE ont dit aux populations affectées par le projet (PAP) ayant perçu une somme supérieure ou égale à un million, que ladite somme était largement suffisante.

Afin de susciter une forte appropriation des actions par les populations locales et leur implication, EDC avait la tâche de mettre en place un programme de communication. Des centres de communication devaient être créés. Ces centres devaient entre autres servir de courroie de transmission entre EDC et les populations, Sensibiliser les populations, etc. Les populations devaient être informées 30 jours sur les dates et heures de passage de l’équipe de recensement. Il était prévu dans le PGES une implication des chefs traditionnels dans la planification et la gestion du recensement.

Des limites ont été constatées dans la mise en œuvre du PGES…

Des populations n’ont pas beaucoup apprécié les méthodes de travail de la CCE et ont soulevé les griefs suivants… »

Mine en Afrique
Crédit photo : Marc Thil (site EuropeAid)

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