Les solidarités inter-territoriales en faveur de l’entrepreneuriat climatique africain

Le 20 novembre, les participants à notre Webconférence échangeront et feront des propositions pour de nouvelles solidarités afin d’amplifier le mouvement entrepreneurial africain en faveur de l’accès aux énergies renouvelables. Les propositions seront rassemblées dans un document qui sera largement diffusé et présenté pendant la COP21. En savoir plus et s’inscrire

Qu’entendons nous par Solidarités inter-territoriales pour l’entrepreneuriat climatique africain ? Voici ci-après des éléments de réponse, à enrichir, compléter, améliorer etc.

Qu’entend-on par solidarité internationale ?

Pour contribuer au développement, les pays dits développés soutiennent les pays en développement. Avant, l’aide publique (financement, aide technique y-compris capacités et transfert technologique) d’état à état dominait.

Toutefois, au cours des trois dernières décennies, le paysage de la solidarité internationale a considérablement évolué, miroir d’un contexte profondément modifié et plus complexe.

La solidarité internationale : un contexte profondément modifié et plus complexe

  • Les crises économiques et financières des pays développés les rendent moins riches et moins aptes à augmenter leur aide vers les pays en développement, contrairement aux objectifs internationaux(1)
  • Le rôle des pouvoirs publics dans les pays en développement a considérablement diminué sous la pression des institutions telles que le FMI, pour faire face à leurs dettes publiques
  • Le développement a été redéfini avec à la fois la reconnaissance du rôle du développement économique et l’impératif du développement humain : indice de développement humain et  Objectifs de développement durable de l’ONU, et impératif d’une attention particulière pour les groupes vulnérables
  • La pauvreté s’est accrue au Nord (8-13% de personnes en situation de pauvreté en France, selon les seuils (2)) alors que des pays en développement et émergents ont vu émerger des classes moyennes et des personnes très riches – la pauvreté et la richesse transcendent les frontières.
  • Dans le même temps, « le nombre de personnes vivant dans une extrême pauvreté a diminué de plus de moitié, passant de 1,9 milliard en 1990 à 836 millions en 2015. Les progrès ont essentiellement eu lieu depuis 2000. »(3)
  • Les inégalités se sont accrues – 1% des individus de la planète possède 44% de la richesse mondiale – créant un sentiment d’injustice chez les moins nantis(4)
  • Les crises environnementales – climat, eau, pollutions de l’eau, la terre, l’air, perte de la biodiversité – re-définissent les besoins des solidarités nord-sud : les pays du Sud ressentent parfois fortement les impacts de ces crises, dont le nord est souvent responsable, mais n’ont que peu de capacités d’y faire face. C’est le cas pour le changement climatique, la déforestation par exemple. Ce sont les pays du Nord qui sont historiquement responsables du changement climatique, mais les pays du Sud en subissent très fortement les conséquences : érosion, phénomènes climatiques extrêmes, sécheresse. Comment intégrer la nouvelle donne environnementale à la solidarité internationale ?
  • Des acteurs non étatiques ont acquis une légitimité incontournable sur le thème de la solidarité internationale : ONG, mouvements de communautés et de paysans, chercheurs scientifiques (Poverty Lab de la Française Esther Duflo), réseaux multi-acteurs, fondations privées (par ex. Bill and Melinda Gates Foundation), etc., du Nord mais aussi du Sud – comment en effet assurer mieux le développement qu’en impliquant les acteurs du Sud

Les acteurs économiques, des acteurs incontournables du développement

En ce qui concerne les acteurs économiques, focus de RSE et Développement, les changements sont sans précédent. Ils deviennent des acteurs majeurs du développement, avec des impacts à la fois positifs et négatifs, qu’il faut donc maîtriser :

  • L’économie s’est mondialisée :
    • Les investissements privés à l’étranger ont augmenté de 241 milliards de dollars US (ccourants) en 1990 à 1 467 en 2013(6)
    • Des échanges commerciaux – avec, du Sud vers le Nord, des ressources naturelles et des produits manufacturés à forte intensité de main d’oeuvre
    • Les entreprises multinationales sont devenues des acteurs tout puissants au Sud. Le CA cumulé des 10 plus grandes entreprises multinationales est supérieur aux PIB cumulés de l’Inde et du Brésil(5)
      • Pour que ces investissements et échanges soient bénéfiques au pays du Sud, il faut qu’ils se fassent dans des conditions économiques, sociales et environnementales responsables et justes.
  • Les économies d’un certain nombre de pays du Sud se sont développées, avec :
    • L’émergence de multinationales des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud, Russie)
    • Des tissus de PME qui se développent et essaient de sortir de l’informel avec plus ou moins de bonheur. Le rôle de ces PME est essentiel pour le développement au Sud : diversification des activités économiques nationales, réservoirs d’emplois, diffusion de l’économie dans les territoires, innovation, grandes entreprises de demain etc.
  • Dans une économie mondialisée, les conditions sociales et environnementales de productions des produits sont souvent lointaines et difficiles à vérifier. D’une certaine manière, on peut avancer que les chaînes de valeur mondialisées ont perdu de leur transparence par rapport à une économie plus locale et basée sur des circuits courts. Comment alors responsabiliser les consommateurs sur leurs choix ? C’est un défi majeur de la solidarité.

Les nouvelles technologies de l’information : de nouveaux possibles

De nouveaux possibles enfin apparaissent, avec par exemple les nouvelles technologies de l’information : de l’accès à l’information sur les marchés pour les paysans africains, aux apps santé pour femmes enceintes, à l’accès aux services bancaires, au micro-don et au potentiel de l’e-learning.

La solidarité internationale doit se renouveler

Dans ce contexte renouvelé et complexe, la solidarité doit se renouveler.

Avant tout, il y a une équation mathématique. Il faut ainsi 100 milliards de dollars US par an pour financer la lutte contre le changement climatique. Seuls les 2/3 ont été trouvés à aujourd’hui. Pour le tiers restant, les spécialistes s’accordent à dire qu’il faut mobiliser les acteurs privés, et qu’il faut maximiser l’impact de chaque dollar investi.

Pour cela, et pour tenir compte du contexte il faut imaginer de nouvelles formes de solidarités :

  • Elles ne doivent pas être juste du Nord vers le Sud, mais aussi Sud-Sud, et pourquoi pas Sud-Nord – c’est pour cela que nous les appelons solidarités inter-territoriales
  • Elles doivent impliquer tous les acteurs, et toutes les formes de solidarités
  • Il faut initier des collaborations entre les acteurs ; c’est un gage d’efficacité
  • Il faut inventer de nouveaux outils et mécanismes de solidarité – ainsi, le programme de webinaires (séminaires en ligne) de RSE et PED pour les capacités RSE des acteurs africains

En ce qui concerne l’économie, l’ONU met en exergue la nécessité d’aller vers des modes de production et de consommation durables. Dans ce cadre, les nouvelles solidarités s’incarnent :

  • Dans des chaînes d’approvisionnement plus responsables, avec plus de transparence sur les conditions sociales et environnementales de fabrication, des consommateurs plus responsables et investis, des circuits plus courts
  • Par la diffusion plus rapide de nouveaux modèles d’entreprises et de produits/services plus durables et de nouvelles technologies meilleures pour l’environnement
  • Par la création de nouvelles communautés de consommateurs, de défense des travailleurs les plus vulnérables au Sud (ex. travailleurs migrants, femmes), des communautés globalisées qui lient acteurs du sud entre eux et avec les acteurs du nord
  • Par plus de coopérations entre les entreprises du nord et celles du sud, ainsi qu’avec d’autres acteurs, pour améliorer leur impact social et environnemental au Sud
  • Par la mobilisation des entreprises multinationales pour le développement
  • Et enfin par toute forme de soutien aux PME africaines pour qu’elles soient responsables et durables

Quelques notions sur la solidarité internationale

Les grandes catégories de la solidarité

Voici une liste de catégories de la solidarité :

  • Financements aux acteurs publics du Sud
  • Investissements privés au Sud
  • Renforcement des capacités au Sud
  • Aide technique, transferts de technologies
  • Collaborations acteurs du Nord avec acteurs du Sud

Nous y ajouterons des formes de solidarité plus spécifiques à l’économie :

  • Promotion de nouveaux modèles d’entreprises, nouvelles formes de production, nouvelles formes de consommation
  • Engagement RSE (Responsabilité sociale et environnementale des entreprises) au Sud
  • Achats responsables
  • Être un citoyen responsable :
    • En faisant attention à l’impact environnemental de sa consommation et aux conditions sociales dans lesquelles les produits achetés ont été fabriqués
    • Par son engagement associatif et au sein d’autres communautés et organisations
    • Par ses investissements, même modestes

Ces solutions sont mises en oeuvre par, et pour différents types d’acteurs :

  • Les acteurs publics (nationaux, territoriaux, institutions internationales)
  • Les ONGs et autres acteurs de la société civile
  • Les médias
  • Les communautés de citoyens
  • Les acteurs économiques (entreprises multinationales, réseaux d’entreprises, mouvements alternatifs (coopératives, économie sociale et solidaire etc.)
  • Et pourquoi pas vous ?

 

Voici à titre d’inspiration des exemples de nouvelles solidarités

Certains exemples concernent le climat, d’autres sont plus larges, mais peuvent s’impliquer au climat.

Financement

Capacités, mentoring/coaching pour des entreprises responsables, durables et innovantes

Accompagnement d’acteurs du Sud pour un développement économique basé sur les énergies renouvelables

  • GERES (Groupe énergies renouvelables, environnement et solidarités) : http://www.geres.eu/fr/
    • En Afrique de l’Ouest, une majorité de la population vit sous le seuil de pauvreté et utilise le bois comme principale source d’énergie. La région, très aride, est fortement exposée aux effets des changements climatiques. Dans ce contexte, le GERES a décidé de travailler dans trois domaines : l’accès à l’énergie en zone rurale au service du développement économique, l’amélioration de l’efficacité des modes de cuisson et l’appui aux collectivités pour la prise en compte des vulnérabilités liées aux changements climatiques. À cela s’ajoute l’appui à l’entrepreneuriat, transverse à tous nos programmes.

Promotion et partage de nouvelles pratiques pour leur diffusion

Initiatives pour les citoyens

 

Notes

(1) Objectif de l’ONU pour le montant de l’aide publique des pays donateurs : 0,7% de leur Revenu National Brut. En 2014, l’aide française s’est élevée à 0.36% de son RNB
(2) Observatoire des inégalités : http://www.inegalites.fr/spip.php?article270
(3) Rapport 2015 sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) http://www.un.org/fr/millenniumgoals/reports/2015/pdf/rapport_2015.pdf
(4) La part du patrimoine mondial détenu par les 1% les plus riches est passée de 44% en 2009 à 48% en 2014, et dépasserait les 50 % en 2016 – Oxfam https://www.oxfam.org/sites/www.oxfam.org/files/file_attachments/ib-wealth-having-all-wanting-more-190115-fr.pdf
(5) http://www.rse-et-ped.info/projets/compte-rendu-principes-de-lonu-relatifs-aux-entreprises-et-aux-droits-de-lhomme-strategies-daction-pour-la-societe-civile-avec-long-sherpa/
(6) UNCTAD, World Investment Reports

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