La Bibliothèque camerounaise de droit et de gouvernance [base de données juridiques camerounaise] fête ses 10 ans en 2014

« C’est une start up du numérique camerounais, la bibliothèque camerounaise de droit et de gouvernance. C’est une initiative privée qui tend à suppléer à l’absence d’un portail public de droit au Cameroun. Elle est aujourd’hui « la plus grande base de données juridique grand public au Cameroun ».

Cette bibliothèque est née de deux constats :

1) L’inégal accès aux instruments juridiques par les citoyens

Au Cameroun, lorsqu’une loi est adoptée par le parlement, promulguée par le Président de la République, elle est publiée au journal officiel qui coûte 1500 FCFA sur le marché et qui est inaccessible ou alors, elle est publiée au quotidien national, Cameroon Tribune, qui lui est visible dans la capitale et dans quelques grandes villes du pays, mais coûte 400FCfa. Ainsi les lois qui par définition sont opposables à tous dès qu’elles sont publiées, ne sont pas accessibles à tous, mais à une oligarchie, un petit nombre capable d’acheter un journal et susceptible de lire et écrire le français ou l’anglais. L’écart commence à se creuser entre ceux qui connaissent les dispositions légales et ceux qui ne les connaissent pas. Les lois et les décrets s’empilent dans un maquis de plus en plus inextricable, augmentant l’insécurité juridique.

Pourtant en justice, on présume et on affirme péremptoirement que « nul n’est censé ignorer la loi ». De sorte que ceux qui connaissent la loi et ceux qui ne la connaissent pas sont logés à la même enseigne, au nom du principe de l’égalité de tous devant la loi. Les sanctions sont les mêmes pour ceux qui connaissent la loi et ceux qui les ignorent, compte non tenu du fait que l’égal accès à la loi n’est pas réel.
La seule chose qui distingue l’ignorant et le connaisseur de la loi est que celui qui connait la loi paye une amende ou subit une peine privative de liberté en étant conscient, alors que l’ignorant lui, va en prison comme Joseph K. dans le procès de Kafka. Franz Kafka, dans son ouvrage, relate les mésaventures de Joseph K. qui se réveille un matin et pour une raison obscure, est arrêté et soumis aux rigueurs de la justice. Joseph K réfute son accusation alors qu’il est innocent, d’autant plus qu’il ne sait absolument pas de quoi il est accusé.

2) Le faible contrôle de l’action publique par les gouvernés

Au Cameroun, la plus grande partie d’actes de mal gouvernance sont le fait de l’absence de contrôle de l’action publique par les populations sur les dirigeants, la quasi absence du contrôle des gouvernés sur les gouvernants.

C’est Montesquieu qui écrivait dans « de l’esprit des lois » que pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. L’action publique doit être contrôlée par les gouvernés.

Or le système de souveraineté représentative qui régit le Cameroun et tous les jeunes Etats Africains a pour principale tare que la grande majorité des gens vivent en dehors de ce que l’économiste péruvien Hernando de Soto appelle dans « le mystère du capital », « la cloche de verre », celle-ci faisant de l’espace public un espace privé, fermé et ouvert à un petit nombre, en exaspérant la majorité des gens qui, du dehors, observe ce qui se passe à l’intérieur de la cloche de verre, médusée et désespérée.

Dans ce système, les populations sont des simples électeurs, c’est-à-dire un souverain de circonstance (d’un jour) tous les 5 ans et muet le reste du temps. Les politiques publiques, loin d’être un agenda du peuple, sont un agenda des élus, des stratégies concoctées par les élus ou les spécialistes, qui sollicitent un petit nombre de citoyens pour qu’ils parlent à la place du plus grand nombre, autrement dit pour qu’ils représentent la totalité. On parle alors de gouvernement des hommes, loin de la gouvernance des sociétés qui est la recherche par l’Etat d’une participation optimale des citoyens à l’amélioration du cadre de vie, en rapport avec les vœux des habitants.

Il est évident que dans les contextes où les populations s’instruisent, il leur est difficile d’accepter l’oppression et de laisser à d’autres le soin de leur destin.

Dans son livre, « la démocratie en miettes », Pierre Calame appelle de tous ses vœux la gouvernance en démontrant que la légalité seule ne suffit pas. Il demande de légitimer la loi, c’est-à-dire la soumettre à l’adhésion des populations avant son application. Pour cela, la loi doit revêtir cinq qualités :

    • Répondre à un besoin ressenti par la communauté ;
    • Reposer sur des valeurs et des principes connus et reconnus ;
    • Etre équitable ;
    • Etre exercée efficacement par des gouvernants responsables et dignes de confiance ;
    • Appliquer le principe de moindre contrainte.

Pour que la gouvernance émerge, que les populations puissent contrôler leurs dirigeants, il faut qu’elles soient informées sur les procédures administratives, sur le fonctionnement des institutions, sur leurs droits et leurs obligations.

Le philosophe français Auguste comte écrivait que dans un cas, je me sens obligé par la loi, dans l’autre je suis autorisé par la loi. Au nom du droit je peux formuler des revendications, au nom du devoir, des exigences auxquelles je dois me soumettre. Mes droits imposent à autrui des devoirs et réciproquement. Ne penser qu’à ses droits peut être égoïste et dangereux. Car la propension naturelle est d’exagérer ses droits, de prendre ses désirs pour des droits et d’oublier ses devoirs. Voila pourquoi, affirmait-il, si chacun fait son devoir les droits de tous seraient respectés. Ce sont les valeurs de cohésion sociale que genère l’information juridique et la confiance dans son pouvoir émancipateur qui m’ont amené en 2004 à créer www.atangana-eteme-emeran.com qui est une solution innovante, agrégeant des lois et décrets ainsi que toute la réglementation camerounaise sein d’une banque de données s’adaptant à tous les centres d’intérêt :

      • Agriculture ;
      • Mines ;
      • Urbanisme ;
      • Santé animale et humaine ;
      • Institutions ; etc…

www.atangana-eteme-emeran.com est bâti sur les principes qui fondent les grandes bibliothèques publics du monde « Libre à tous » tel que c’est écrit au dessus de l’entrée de la bibliothèque de Boston, ou encore, la citation de Jefferson gravée en lettres d’or dans le marbre de la bibliothèque de New-York « je considère, l’éducation comme le meilleur moyen d’améliorer la condition humaine, promouvoir la vertu et assurer le bonheur des hommes ».

Ce site diffuse « urbi et orbi » (à la ville et au monde) les textes de droit du Cameroun, qui sont mis à la disposition de tous (population vulnérable, femmes, enfants, investisseurs, pouvoirs publics) gratuitement.
www.atangana-eteme-emeran.com adonc une existence de 10 ans durant lesquels il a participé à la promotion de la bonne gouvernance au Cameroun, à travers :

        • la diffusion gratuite des lois à la ville et au monde ;
        • le renforcement des capacités des citoyens consécutif ;
        • le partage des connaissances juridiques.

Afin de marquer cet événement important du site internet, nous avons le plaisir d’annoncer à tous la célébration de cet anniversaire à Yaoundé en un lieu à préciser ultérieurement. Une conférence sera organisée à cet effet. Les invitations qui parviendront aux uns et aux autres en temps opportun, indiqueront l’emplacement exact et le programme de la journée. »

Crédit photo : F. Lefèbvre – Site EuropeAid

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Dr. Eméran Atangana Eteme
Mr. Eméran ATANGANA ETEME est Docteur du 3ème cycle en droit public, diplômé de l’académie internationale de droit constitutionnel de Tunis. Il est également administrateur civil principal, [...]
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